dimanche 16 février 2014

Anne de France, duchesse de Bourbon

Née en 1461, fille aînée du roi Louis XI et de son épouse la reine Charlotte de Savoie, sœur de Charles VIII et de Jeanne de France, épouse de Pierre de Beaujeu, duc de Bourbon et mère de Suzanne de Bourbon. Elle fut aussi la belle-sœur de Louis d'Orléans son cousin, futur Louis XII. 
Elle est née en  avril 1461 à Genappe ( en Wallonie) alors que son père n'était que Dauphin de France, en rébellion contre son père Charles VII et protégé par Philippe le bon duc de Bourgogne. Louis devint roi de France en juillet 1461.

Elle fut élevée avec sa sœur auprès de sa mère à Amboise. Charlotte de Savoie ne joua aucun rôle politique et fut tenue éloignée de la cour par son époux, mais elle créa à Amboise une belle bibliothèque, noyau de la future bibliothèque de France, et donna une solide culture à ses filles.

Anne fut mariée  à 12 ans en 1473 (contrat signé à Jargeau en 1472) au cadet de la famille royale de Bourbon, Pierre de Beaujeu, de 20 ans son aîné. Pierre de Bourbon était membre de la ligue du bien public qui, sous la houlette de du duc du Charolais (futur Charles le Téméraire, duc de Bourgogne), se révolta contre Louis XI en 1465. Son mariage le rallia définitivement à Louis XI, dont il devint un des principaux conseillers.

Anne fut régente du royaume de France durant le règne de son frère Charles VIII, sans en porter le titre, avec son époux Pierre de Beaujeu. C'est un cas unique, car en général ce sont les reines-mères qui exercent la régence. Au demeurant, la reine Chalotte était déjà malade à la mort de son époux et le suivit dans la tombe le 1er décembre 1483.
Elle avait 22 ans à la mort de Louis XI en 1483. Confortés par les États généraux de 1484 dans la régence, Anne et Pierre durent toutefois faire face à une coalition de princes menés par Louis d'Orléans et durent combattre pendant quatre ans. Enfin Louis d'Orléans fut battu et incarcéré. Pendant cette période, tandis que Pierre restait aux commandes de l’état, Anne accompagna plusieurs fois le roi son frère et ses armées.
Elle fut à l'origine du mariage de Charles VIII et Anne de Bretagne en 1491, qui scella le rattachement de la Bretagne au royaume de France. Cette même année, son frère devenu adulte prit le pouvoir en main et elle donna naissance à Suzanne, sa fille et unique héritière. Du fait du décès des deux frères de Pierre, ce dernier devint duc de Bourbon. Lui et Anne se retirèrent alors dans leurs domaines, et firent de Moulins leur capitale. Si la présence d'Anne se fit plus discrète, les fréquents séjours de Charles VIII à Moulins attestent que son influence politique au niveau du royaume restait réelle.
Anne favorisa ensuite l'accès au trône de Louis d'Orléans à la mort accidentelle de Charles VIII en 1498, notamment en acceptant l'annulation de son mariage avec sa sœur Jeanne, afin probablement de conserver le duché de Bourbon après la mort de Pierre de Beaujeu (intervenue en 1503) et en l'absence d'héritier mâle. Elle n'eut en effet qu'une fille, Suzanne, mariée au duc de Montpensier, et le couple n'eut lui-même aucun descendant mâle.

Le rôle politique d'Anne fut généralement minimisé, par elle-même en premier lieu, car en France les femmes ne gouvernent pas officiellement. Toutefois les travaux d'Eliane Viennot tendent à démontrer qu'elle fut une régente à part entière, et que son frère s'appuya sur elle bien après sa majorité, notamment pendant les guerres d'Italie. E. Viennot en fait la première princesse gouvernante d'un long siècle marqué par les femmes aux affaires, et une éducatrice des princesses d'Europe : Louise de Savoir, mère de François 1er, était auprès d'Anne de France de 6 à 12 ans. Elle y fit la connaissance d'une autre fillette, Marguerite d'Autriche, future régente des Pays-Bas, présente en qualité de fiançée de Charles VIII (qu'elle n'épousa pas finalement). La duchesse Anne de Bretagne, orpheline à 12 ans, fut élevée par Françoise de Dinan, placée auprès d'elle par Anne de France. Mais la jeune duchesse prit rapidement les rênes du pouvoir contre sa belle-sœur en arrivant à la cour de France.

Elle fit de Moulins une capitale régionale importante, en bâtissant un château Renaissance et en faisant restaurer la cathédrale, mais aussi en favorisant tous les arts. Elle écrivit deux livre pour sa fille Suzanne : Enseignements pour ma fille et l'Histoire de siège de Brest. Dans le premier, elle décrit à sa fille la conduite irréprochable qui doit être celle d'une grande aristocrate, mais aussi l'art de créer et d'animer autour d'elle une cour brillante. Marguerite de Navarre, la soeur de François 1er, le fit rééditer.
Sa correspondance n'a pas encore fait l'objet d'une édition, ni même d'une étude générale critique.

Elle est morte en 1522 au château de Chantelle dans le Bourbonnais. Elle est enterrée dans l'église collégiale de Souvigny, qui réunit les tombeaux de la famille de Bourbon.


Anne de France : Enseignements à sa fille, suivis de l’Histoire du siège de Brest
Tatiana CLAVIER & Éliane VIENNOT (éd.)
La grand-mère de Brantôme a connu la princesse et il en parle dans ses oeuvres.
Pierre Pradel, Anne de France (1461-1522), Paris, Publisud, 1986.

Thierry Crepin-Leblond (dir.), Anne de France. Art et pouvoir en 1500, Paris, Picard, novembre 2014, ISBN : 978-2-7084-0974-3, 69 euros.
Paul Pelicier, Essai sur le gouvernement de la Dame de Beaujeu, Imprimerie Garnier, Paris, 1882

Eliane VIENNOT, "Anne de France (1461-1522) dame de Beaujeu, duchesse de Bourbon, régente de France : un cas d’école pour la recherche sur les femmes et le pouvoir" - Paru dans les Cahiers du Celec, 3(Reines princesses, favorites : quelle autorité déclinée au féminin ?), 2012

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